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mardi 31 juillet 2012

De Saint-Michel à l'Odéon


De Saint-Michel à l'Odéon : avec un tel titre, on pourrait croire que je veux évoquer une manif' étudiante qui se serait déroulée au Quartier Latin à Paris, très classiquement du Boulevard Saint-Michel à la Place de l'Odéon. Mais l'occasion d'assister hier soir avec mes fils à la projection du (trop) long dernier Batman à la salle de cinéma l'Odéon à Guémené, me fournit en fait la matière de ce nouveau post concernant le cinéma à Guémené-Penfao et son histoire.


Cela faisait bien longtemps que je n'y étais allé et j'ai donc découvert avec bonheur avant même la belle salle actuelle, que l'on avait disposé, dans le sas d'entrée, un petit rappel à l'histoire.


Nul doute que certains d'entre vous ne connaissent cette histoire, mais dans le cadre de l'approche vaniteusement encyclopédique - quoique vagabonde - de ce blog, je me devais d'"ensiler" ces renseignements.


Bien sûr on s'extasie d'abord devant l'ancien appareil de projection monumental qui trône dans le sas d'entrée de la salle, avec sa drôle de cheminée et ses deux magasins à films en oreilles de Mickey,. Et rien qu'à le regarder, on entend en imagination son ronronnement bienveillant...










Mais le plus instructif provient du petit document placardé à côté, qui retrace succinctement l'histoire du cinéma de et à Guémené et reproduit un bulletin paroissial de 1934.


Bref historique


Voici la transcription du texte affiché :

"C'est en 1912 que fut construite la salle de l'Association nommée évidemment "l’Étendard", à l'usage des écoles catholiques. Pendant la guerre de 1914 - 1918, elle fut utilisée comme hôpital pour les blessés.


Dans les années 1922 - 1923, un cinéma ambulant y fonctionnait. Le premier film projeté avait pour titre "la Passion".


En l'année 1934, comme en témoigne le bulletin paroissial de l'époque, le cinéma parlant fit son entrée à la salle Saint-Michel. On installa dans la cabine un appareil unique, fixe, 35mm. Les gens qui ont de la mémoire se souviennent de titres de films de l'époque : "Dactylo'", "Monsieur Victor".


Des modifications techniques eurent lieu par la suite, dans les années 50 et 60. Les opérateurs disposaient enfin de deux appareils.


Jusqu'alors, comme dans beaucoup de situations similaires, la salle faisait partie des activités paroissiales. Les choses changèrent en 1970."


Voilà donc comment on est passé au cinéma "l'Odéon".


Bulletin paroissial inaugural






Ce bulletin, qui sent sa vieille ronéo à alcool, est daté du 16 septembre 1934. Il annonce l'inauguration du "nouvel appareil de cinéma SONORE et PARLANT 100%". Au passage, le 100% mentionné laisse un peu rêveur et on se prend à imaginer ce que serait (ou était) du cinéma sonore et parlant à moins de 100%...


Les deux premières séances de cette nouvelle ère cinématographique guémenoise eurent ainsi lieu le 23 septembre 1934 à 3 heures et 8 heures "heures anciennes" (c'est vrai que jusqu'à il n'y a pas longtemps, on trouvait encore des gens qui fonctionnaient à l'ancienne heure...).

Notice sur "Dactylo'"

Le premier film parlant projeté à Guémené à la salle Saint-Michel fut un film à succès français de 1931, "Dactylo'", tourné par un certain Wilhelm Thiele. Il s'agit d'une comédie durant 77 minutes, mettant en scène une vedette féminine française de l'époque, Marie Glory.

L'intrigue peut se résumer ainsi : après maintes péripéties dramatiques l'amour finit par triompher et ainsi Simone, une employée de banque, réussit à épouser son patron Paul Derval (!) (cf. : http://fr.wikipedia.org/wiki/Dactylo).

Nul doute que cette projection fut appréciée du public.

NB : le premier film projeté, "La Passion", est semble-t-il un film anonyme de 1912  et sans doute très "catholique" 
(cf. : http://www.cineressources.net/recherche_t.php)...


samedi 28 juillet 2012

Un Vicomte aux oubliettes



Vous connaissez les Simon. Vous connaissez aussi Gilles Durand, Henri de Boisfleury. Vous vous rappeler Eugène Leblay. Mais avez-vous jamais entendu parler de Maurice Luc, Vicomte de Sapinaud qui fut pourtant lui aussi Maire de Guémené-Penfao ?

Non ? Pas trop ? A vrai dire moi non plus : seul le hasard m’a fait découvrir qu’un Vicomte de Sapinaud fut jadis, un temps, le premier magistrat de cette commune.

Parmi les raison de l’oubli, il y a sans doute le caractère très météorique de son mandat. Sans doute aussi le fait qu’il n’appartenait pas à une famille du pays. Et visiblement, ses réels exploits personnels ont eu un autre théâtre d’opération que le modeste chef-lieu de canton qu’est Guémené.


Maurice Luc, Maire de Guémené

Ce paragraphe aurait pu être court tant la durée du mandat du Vicomte de Sapinaud, Chevalier de la Légion d’Honneur, fut brève. Il remplace Fidèle Simon en juin 1874 avant d’être remplacé à son tour par…Fidèle Simon père, ce dernier étant nommé par Décret du Président de la République en date du 20 mai 1876. L’installation de ce dernier ayant eu lieu le 31 mai suivant, Maurice Luc de Sapinaud Maire a tout au plus « tiré » deux ans !

J’ignore aussi bien les raisons de sa nomination que celle de son débarquement. Il faut se rappeler qu’avant 1884, où une loi instaure le fonctionnement politique toujours actuel des municipalités, les Maires sont nommés par le Pouvoir Exécutif.

Maurice Luc a dû donc plaire, puis déplaire ; ou bien être adéquat, puis ne plus l’être.

Son action politique s’inscrit dans le train train de la gestion communale courante de l’époque (et d’aujourd’hui souvent) : budget et finances communaux, entretien de la voirie, assistance et bienfaisance publiques, gestion du « personnel » communal (instituteurs, gardes-champêtres, sages-femmes…), vie politique (mise à jour des listes (limitées) électorales, par exemple), gestion du foncier communal, etc.

Je tiens néanmoins à sortir de cette grisaille trois faits qui adornent et rehaussent l’éclat de cette mandature :

-         la mise en place à Guémené de la souscription nationale pour venir en aide aux « centaines de milliers » de victimes de la grande crue de la Garonne de juin 1875 (détails sur cet événement : http://ahbon.free.fr/crue_1875_2.html ) ;

-         l’adjudication d’un marché communal concernant la fourniture de bancs publics à Guémené ;

-         le rejet par deux fois d’une pétition sécessionniste des habitants de Beslé, réclamant l’érection de « leur paroisse en commune » (les manants !).



Histoire (familiale) d’un Vicomte

Mais d’où sort donc le Vicomte ?

C’est en effet à ce se demander d’où sort cet illustre inconnu. La réponse est : d’une bonne vieille famille aristocratique bien réactionnaire.

Maurice René Luc, vicomte de Sapinaud de Boishuguet, est né à Savennières (Maine-et-Loire et pays de vignobles) le 7 juin 1837. Il est décédé en juillet 1921 à Angers, ma mère avait deux mois et j’ai beau insister, elle persiste à dire qu’elle était trop jeune pour se rappeler ce triste événement qui aurait pourtant dû marquer les Guémenois jeunes et vieux.

Il est le fils de son père Ernest, Chevalier de Malte, et le troisième enfant d’une fratrie de quatre. Notons au passage que son frère puîné, Joseph, épousera vers 1875 Bertille de Bruc de Montplaisir, de la famille ci-devant régnante de Guémené.

Papa Ernest, né vers 1802, était le fils sixième et dernier enfant de Jean René Prosper Félicité, Vicomte de Sapinaud etc…Celui-ci était officier du Roi (Louis XVI) et émigra en 1791 pour combattre la Révolution dans ce qu’on appela l’Armée des Princes. Il participa à l’expédition de Quiberon, un débarquement qui eut quelques retentissements dans la région. Bref un vieux de la vieille.

Notre ami Maurice Luc, pas inquiet, avait épousé une aristocrate parisienne déjà deux fois veuve. Le couple fut sans postérité (dans tous les sens du terme, d’ailleurs).

Comme on le constate, les liens affectifs avec Guémené du Sieur de Sapinaud semblent assez ténus. La possession de terres dans le secteur est l’explication la plus plausible.


Le Vicomte fait le zouave

L’essentiel de la geste du Vicomte Maurice est ailleurs.

En effet, âgé d’un peu plus de vingt ans, il s’engage dans la légion des volontaires catholiques plutôt royalistes, souvent originaires de Bretagne ou des actuels Pays-de-Loire, qui va défendre les Etats du Pape, menacés par le processus de l’Unité italienne. Ainsi devenu Zouave Pontifical et ayant belle allure (cf. photo ci-dessous), il fait la campagne d'Italie et participe notamment au combat de Castelfidardo où Sa Sainteté s’est prise, à la fin de l’été 1860, une déculottée mémorable (une décalottée, même). Une anecdote qui en dit long sur le type de recrutement de cette légion de volontaires calotins : un général italien consultant la liste des victimes de cette bataille décisive aurait ironisé : « L'on dirait une liste d'invités à un bal de Louis XIV ! ... ».



Recommandation

Il semble nécessaire de marquer quand même la trace de cet ancien édile.

L’usage évidemment c’est de dédier un lieu public : une avenue, un boulevard, une place, ne serait-ce qu’une rue, voire une impasse ou un square.

Mais compte tenu, d’une part, de la modicité de son attachement et de sa contribution politique à Guémené et, d’autre part, de l’orientation apparente de ses convictions, une plaque sur un prie-dieu semblerait plus adaptée.


lundi 23 juillet 2012

"La Mèr' Mariette"


Voici un sixième rimiau en patois de Guémené, après "La Truie à Nanon", "La Soupe au choux", "Comment Mathurin Sicard ne put entrer au Ciel", "La chemise" et "Saint Goberien".

Comme pour "Saint Goberien", j'ai procédé à des modifications mineures sur le texte de l'abbé Chenet. Je dispose en effet d'une autre version, trouvée sur le Net, avec des variantes de détail et j'ai veillé par ailleurs à ce que les vers soient bien des alexandrins de douze "syllabes". Enfin, j'ai modifié parfois l'orthographe pour s'approcher de la prononciation qui me paraît la plus juste.

"La Mèr' Mariette" illustre la pingrerie, le cynisme pratique et l'intelligence campagnarde.

L'histoire est simple comme toujours : une femme, très riche héritière du bourg de Guémené, enterre son mari avec un minimum de frais et se garde bien de dépenser en prières pour le salut du défunt. Arrive le premier anniversaire du décès, et le curé vient la relancer pour les messes - payantes - de la commémoration annuelle.

Ayant eu le temps d'y réfléchir, la Mèr' Mariette a trouvé un raisonnement imparable pour garder "sa galette". On appréciera surtout le dernier argument utilisé, qui incrimine judicieusement le défunt !


Je dédie ce petit conte aux anciens (et actuels) résidants de la rue de Mirette. Le voici :


Les anciens du pays ont ben connu Mariette,
La vieille avaricieus’ de la rue de Mirette,
La femme à Mathurin, le plus rich’ du pays,
Cell’ qu’avait hériteu d’son gros cousin d’ Paris.
Quand son bonhomm’ fut mort, l’y laissant sa fortune
Dame ell’ l’ fit enterreu au fond d’ la fouss’ commune :
I n’eut que l’enterr’ment des pauvres misérables,
Et pour des gens si rich’s, ça ’te point formidable.
Quand il y’eut un’ anneu que Mathurin fut mort
L’ cureu vint vouèr la veuve et li dit dès l’abord :
« Eh bin, la Mer’ Mariett’, pensez-vous au service ?
Au servic’ du bout d’l’an, qui comport’ deux offices ?
Le pauv’ pèr’ Mathurin n’a pas souvent d’ prière !
Faudrait li en fair’ dir’, car c’est vous l’héritière ! »
« Monsieur l’ Cureu, qu’ell’ dit, j’en avais ben l’ideu !
J’ai eu l’ temps d’ réfléchir pendant tout’ mon anneu.
Et j’ai bru tout mon saoul ben des faill’ en cachette.
Tout le mond’ vous l’ diront dans la rue de Mirette :
Je se un’ bonn’ personn’ qui n’ tient point à l’argent
Et qu’a terjous partout fait les chous’s largement.
Mais je m’ se dit tout d’ mêm’, dam’ ma pauvr’ Mer’ Mariette
Laiss’ don les chous’s alleu, et gard’ don ta galette
A quoi bon t’ tourmenteu pour ton pauvr’ Mathurin.
Son sort est décideu à c’t’ heur’-ci, c’est certain.
S’il est au Paradis, il n’a point besoin d’ nous
Et ça n’est pas la pein’ de dépenseu tes sous !
S’il est dans les enfers, le pauv’ pèr’ Mathurin,
C’est un ben grand malheur. Mais dam’ on n’y peut rin.
S’il est au Purgatoir’, j’ pourrions ben l’ secourir,
Mais, têtu, comme il ‘te, y n’ voudra point sortir ! » 

samedi 21 juillet 2012

Chef d'oeuvre en péril

Mes premiers "pas" à Guémené remontent, je l'avoue, à août 1957, à La Hyonnais, ce centre du monde (le mien, en tout cas). Mais finalement, on sortait peu de son coin. Une exception toutefois pour la Vallée, site d'excursions, et donc le village de Mézillac qui marque une espèce de limite de la terra cognita : au-delà, le pays des chimères.

Si bien je n'ai mis les pieds dans les villages de Guénouvry que très récemment. Conscient de cette inexcusable lacune, j'ai profité d'une matinée pluvieuse pour ainsi, hier matin, partir visiter la Chapelle St Georges...à St-Georges.


En quittant l'esprit insouciant ma Hyonnais, je m'attends à trouver un site au cordeau, propre comme un sous neuf, à l'instar de ce qui s'observe, en allant sur Massérac, pour la très belle chapelle St-Yves.

Car c'est quand même la plus importante des chapelles restantes de Guémené par sa taille et par son histoire (avec celle de St-Anne des Lieussaints, sans doute). Mais enfin, c'est la seule à être inscrite au patrimoine des monuments historiques de France et c'est d'ailleurs le seul site guéménois à jouir de ce privilège.

Voici mon reportage : histoire et photos.


L'arrivée

J'ai passé Mézillac pour prendre un plus loin à droite la direction du gros village du Verger. Le ciel est chargé de gros nuages gris sombre et le Verger paraît prémonitoirement sinistré : ici où là des maisons en ruines ; à un carrefour un bonhomme retranché derrière un grillage à poule - pour toute protection de sa propriété privée -,est assis parmi un étalage de pots et de jardinières à fleurs...vides, à bovinement regarder les passants...passer.

Et puis un peu plus loin, un chemin à droite et au sortir d'un petit virage sur une route qui monte, après la dernière maison et la dernière grange, mais tout contre : la chapelle qui s'élève dans le ciel plombé. Elle paraît juchée sur une petite éminence.

La première chose qui frappe en arrivant c'est la silhouette pittoresque du bâtiment, assez grand et trapu, avec son petit clocheton quadrangulaire, mais surtout un aspect général de délabrement, de décrépitude et d'abandon qui fait vraiment de la peine.

Les fenêtres sont à peine remplies de pauvres vitraux miteux dont des carreaux sont cassés ; la végétation envahit le site, engoncé dans les herbes folles et les arbustes intempestifs, et on voit bien que peu d'entretien y est dispensé.

Mais quand même, dans sa pauvreté et son délaissement, cette chapelle a encore de l'allure.


L'incontournable rappel historique

J'ai déjà traité un peu le cas de la chapelle St-Georges dans un post précédent : donc pardon pour la redite si par hasard il se trouvait des lecteurs assidus ou parfaitement instruits de l'histoire de ce bâtiment.

La Chapelle St-Georges de Penfao est inscrite à l'inventaire des Monuments Historique depuis 2004, et c'est d'ailleurs le seul monument à jouir de ce privilège à Guémené, mais un parmi 239 en Loire-Atlantique.

Il s'agit d'une chapelle "frairiale" et "priorale" :

Frairiale :  les habitants des villages environnants formaient une des frairies de la paroisse de Guémené-Penfao (précisément, la frairie de Penfao, comprenant les villages de Mézillac, Ligançon, Saint-Georges, du Pont Bernard, du Verger, de Claie, Trineuc et Guénouvry). Ils pouvaient se marier dans la chapelle, s'y faire enterrer et y commettre diverses cérémonies et dévotions.

Priorale : Un prieuré bénédictin (c'est-à-dire un monastère) était attenant à la chapelle, quelque part je ne sais pas où. Ce prieuré dépendait de l'abbaye de Paimpont. Près de la chapelle se trouvait le cimetière des moines du prieuré.



La visite

Je n'imaginais pas en visiter l'intérieur. Mais au moment où j'arrivais, le fort sympathique propriétaire des lieux qui sont adjacents à la chapelle, sortait et nous nous sommes abordés. Il m'a proposé la clé pour en aller voir l'intérieur.

C'est une grosse clé en fer de "dans le temps". Je suis donc parti à grandes enjambées dans l'herbe haute détrempée, jusqu'au vieux portail Sud. Je me dis qu'il doit y en avoir des morts d'enterrés par là sous mes pieds : moines heureux, paysans besogneux, petits enfants souffreteux, paquet de parents et ancêtres sans mémoire.

Un trou de serrure rouillée sur une porte de bois pour le moins fatiguée dominée d'un linteau de pierre bleue sobrement ouvragée.

Mais bon, on éprouve de l'émotion.

L’aspect général de l'intérieur confirme la première perception extérieure.

Et l'amplifie : une lumière sale et pauvre filtre par les fenêtres et laisse dans la pénombre la vaste pièce pavée de grosses et rugueuses dalles de schiste ; derrière une balustrade de bois qui n'a pas dû voir un pinceau depuis au moins 100 ans, un autel "protégé" par du papier journal (des souillures des oiseaux...) ; un touchant petit tabernacle d'un bleu pâle usé par le temps où se détache un calice doré et frêle. Au-dessus de l'autel, l'emplacement béant d'un décor (un tableau de St-Georges paraît-il, parti en restauration, paraît-il, sans grand espoir de retour probablement...). A côté, un minable panneau où l'on a collé une sorte d'article de journal agrandi, racontant la chapelle.

Je me retourne comme le prêtre à l’Élévation. Une double rangée de vieux bancs me regardent muets. Au-dessus, le plancher du plafond est crevé et laisse apercevoir le toit et même, en regardant bien, le jour...Au fond, le grand portail ouest où filtre la lumière par les interstices de ses planches disjointes. Bref, c'est pas la joie.

Je descends de l'autel et arpente la chapelle, foulant aux pieds les tombes sans nom de ceux dont le corps défunt méritait cet emplacement de choix. Deux petits détails égarés dans cet abandon, deux petits bénitiers blancs où des milliers de mains (fines pour les orants tonsurés ; calleuses, pour les autres) se sont glissées furtives pour signer les milliers de silhouettes à jamais disparues qui se courbaient jadis en ces vallons devant leur dieu ou devant la terre de Penfao.

Il est temps de ressortir. Je vais faire le tour de la chapelle. Un champ de choux vient en lécher le flanc Nord. Les mêmes façades grises et humides.

Quand on quitte le lieu par le chemin qui s'élève à l'Ouest, la chapelle se tapit petit à petit, et s'en retourne à son endormissement de vieillarde malade.


Les photos

Voici un petit diaporama de cette visite. J'y ai laissé à dessein les photos sombres de l'intérieur même si l'on voit peu de choses : ça fait partie du témoignage.


























L'appel

C'est évidemment un peu pompeux, mais il me paraît nécessaire de pousser un cri personnel et modeste, après d'autres sans doute (j'espère), pour qu'on restaure la gloire passée et méritée de la Chapelle St-Georges de Penfao : pour Guémené, pour la frairie de Penfao.

Je rêve de l'inauguration, en présence des Autorités et d'un "grand concours de peuple", d'une chapelle rénovée et rendue à sa splendeur antique et modeste.

Poussons !


mardi 17 juillet 2012

A la Mémoire de Marie Rolland

J'ai déjà évoqué dans des posts précédents la figure de Marie Rolland, enseignante à Guémené, avant guerre, chercheuse de pétrole déçue, personnage clé de la Résistance aux nazis dans la région.


Ce matin, j'ai garé ma voiture sur le parking situé en contrebas de la mairie, à descendre vers le Don. Il y a là, à droite en regardant au sud, un petit square aménagé.


C'est un carré à peine remarquable, avec une pelouse, des massifs de fleurs, un coin avec des bancs.


Au milieu, serpente un petit sentier.


Une colonne de pierre avec un motif décoratif à peine visible ; une stèle basse où l'on lit à peine :


"RÉSISTANCE
ESPÉRANCE"


Une dalle de schiste où s'incliner.

Honneur à Guémené, qui sut rendre hommage à cette personnalité.









Si quelqu'un pouvait me procurer une photo de Marie Rolland, je la publierais bien volontiers, ainsi que tout témoignage intéressant sur elle. Merci d'avance.


La Légende du sire de Claye et de la chasse Saint-Hubert



Si par aventure, venant de Mézillac, vous traversiez le village de Claye, à droite avant d’arriver à Guénouvry, vous auriez peine à croire qu’il y avait jadis ici un fort beau manoir.

Et pourtant, il y a bien longtemps y demeurait le sire de Claye, brave chevalier de nos pays, qui y menait bon train avec son épouse et ses compagnons d’armes.

Hélas ! il déplora la perte précoce de cette épouse et ne put trouver consolation que dans la pratique effrénée de la chasse. Chaque jour on pouvait ainsi l’apercevoir chevaucher à travers bois et landes, accompagnés de ses compagnons et de sa meute, courir sangliers, cerfs ou chevreuils.

Une bête, pourtant, résistait à ses assauts : c’était un grand vieux cerf qu’il poursuivait depuis longtemps mais qui ne se laissait pas atteindre.

Il advint qu’au jour de Pâques, un piqueur avisa le pied dudit grand cerf tout près du manoir. Le sire de Claye s’apprêtait avec sa maisonnée à partir à la messe quand le piqueur vint l’avertir de sa découverte.

Un des chevaliers présents eut beau lui rappeler que son devoir en ce jour de Pâques était d’assister à la messe : le seigneur des lieux lui répondit en le rassurant qu’il forcerait la bête avant le Saint Office, de sorte qu’il pourrait bien honorer son devoir.

Le sire de Claye fit alors sonner le rassemblement et la troupe partit au galop.

On galopa par monts et par vaux, par landes et par bois : mais le vieux cerf toujours se dérobait.

Soudain au détour d’un vallon, le cheval du sire de Claye s’arrêta brusquement, projetant son cavalier à terre. Au loin, la clochette de la Chapelle Saint-Georges sonnait l’Elévation : bientôt la messe serait dite. Pris de remord, le sire de Claye se releva pour remonter à cheval et se précipiter à la messe.

Mais ses jambes étaient lourdes, lourdes comme pierre. Il jeta un regard circulaire sur sa suite et sa meute, et même au loin sur le vieux cerf. Tous étaient pétrifiés, transformés en quelque sorte en menhirs.

Bientôt lui-même ne fut plus qu’une masse de pierre inerte.

Ainsi Saint-Hubert punit le chasseur impie et l’on pouvait voir encore, naguère, vers Tréguely, Le Verger, Ligançon ou vers le Luc, la cohorte des carrosses, piqueurs, chevaux et chiens immobiles pour l’éternité, dispersés dans les landes.




Sans doute cette légende permet-elle de rendre compte des traces nombreuses laissés par les Celtes sous forme de mégalithes, dans la région de Guémené et au-delà.

On en trouve un peu partout citons les « Demoiselles » à Langon, sur la Lande du Moulin, un alignement dont voici une représentation trouvée dans une revue des années 60.



Mais pour revenir sur Guémené, on peut signaler la présence au Tahun d’un menhir renversé qui mesure 3m 25 de long sur 3m de large et 1 m 30 d’épaisseur.

Ma source d’information révèle que les besoins de l’agriculture moderne ont conduit à vandaliser ces vestiges celtes. Ainsi, un propriétaire de Ligançon dont je tairai le nom, se vantait d’avoir fait détruire une quarantaine de ces mégalithes présents sur ses « métairies » (on est dans les années 60), au-dessus du village du Verger…


Quand au menhir représentant le grand cerf (un soit-disant "menhir de Lan-Sé" dont je ne retrouve pas la trace, pas même en Chine !), on pourrait le voir très au loin, vers l'Isac qui arrose Fégréac, le sud de Plessé et Blain. C'est dire si cette bête "eut grand' pou"...

Sinon un site référençant les sites mégalithiques de Bretagne, notamment de Loire-Atlantique :


dimanche 15 juillet 2012

La Légende du Vivier Noir


Quand on habite la ville, par exemple une rue Championnet quelconque à Paris, il n'y a pas de fantômes, pas de souterrains mystérieux, pas de magie.

Ce qui fait la force de la campagne, c'est que précisément tout y est magique et différent : la preuve, de vieilles histoires indiquent que là où l'on est, à la Hyonnais, sous nos pieds d'enfant, des tunnels courent, joignant la ruine, où jadis s'élevait une tour (?), à la Vieilleville qui se trouve au bout du chemin à l'ouest, et peut-être même la Vieille-Cour, de l'autre côté à l'est.



Sévère Babin serait même venu explorer ces lieux inférieurs avec une lanterne, il y a bien longtemps. C'est ce qu'on raconte.

L'existence même de souterrains fait rêver et frémir : de quel danger cherchait-on à se prémunir ?

Dans le fond d'une armoire de ma grand-mère traînait un petit document imprimé, aujourd'hui perdu, qui racontait des légendes de Guémené.

Nos promenades à vélo nous conduisaient parfois à la Vieille- Cour, qui n'est qu'à quelques centaines de mètres. On s'aventurait le long de l'allée qui mène au manoir, mais pas trop loin.


Dans mon souvenir encore, il y avait une marre boueuse sur la gauche, où mon esprit s'attardait. Une femme s'y serait engloutie il y a bien longtemps. Et cela je le tenais du document du fond de l'armoire.

Était-ce dans cette marre ?

J'ai retrouvé depuis quelques jours la trace de cette histoire. Si vous ne la connaissez pas ou si vous l'avez oubliée, en voici une version.

"Il existait jadis, tout près de l'actuel manoir de la Vieille-Cour en Guémené, un orgueilleux château, planté au milieu de la forêt, qu'un donjon dominait de toute sa hauteur.

C'était le château du Sire Olivier de Corbalon, un chevalier valeureux et batailleur qui entretenait, dans sa forteresse protégée de ponts-levis, une garnison de compagnons d'armes aguerris. Ses souterrains et ses caves étaient remplis de vivres et de munitions.

Et pour préserver le moral de sa troupe, il organisait force joutes, tournois et fêtes. Les longues soirées s'écoulaient en veillées où des trouvères contaient des exploits héroïques.

Le Sire de Corbalon ne manquait pas d'accourir à la rescousse de son cousin Bertrand du  Guesclin quand celui-ci lui faisait signe.

Tout à sa bravoure et à ses exploits guerriers, le Sire de Corbalon n'avait point encore trouvé femme, malgré ses 32 ans, quand il vint à rencontrer la nièce de Charles de Blois dont il était l'un des meilleurs capitaines. On était en l'an 1349,  Magdeleine de Penthièvre était dans tout l'éclat de sa beauté. Olivier de Corbalon eut tôt fait de demander et d'obtenir sa main.

Les cérémonies passées, les époux se mirent en chemin de la Vieille-Cour qu'il trouvèrent embellie des soins du voisinage. Les seigneurs de Derval, de Bruc, de Saran et de Montnoël les attendaient au milieu de salles décorées et fleuries, qui s'extasièrent à la grâce et à la beauté de la nouvelle châtelaine de la Vieille-Cour.

Mais les fêtes s'achevèrent et craignant que son épouse ne s’ennuyât en cette solitude sylvestre, le Sire de Corbalon s'enquit d'un ménestrel pour divertir sa mie qu'il avait vu et apprécié chez son voisin le seigneur de Chateaubriand.

Maître Arbert, le ménestrel, chantait et jouait du rebec à ravir. Magdeleine de Penthièvre, Dame de la Vieille-Cour, prenait grand plaisir à l'écouter. 

Maître Arbert charmait toute la suite de son entrain et de son art, mais bientôt le Sire de Corbalon se lassa de la fête et songea à repartir guerroyer. L'occasion lui vint de la reprise de la "guerre des Deux-Jeanne".

En bonne épousée délaissée, Magdeleine se languit de son mari et se mit à dépérir dans le château déserté, perdant ses belles couleurs.

Maître Arbert, on s'en doute, s'employa à la consoler et à lui redonner goût de la vie. Pour ce faire, il se mit à exalter sa passion pour la belle châtelaine. Sa passion ne laissa pas insensible Magdeleine qui peu à peu recouvra gaîté, charme et santé.

Las ! Désireux de revoir son aimée, Sire Olivier rentra seul un soir.


Personne ne se précipita à sa rencontre, mais dans la grande salle où il pénétra, une mélopée langoureuse s'exhalait : son épousée, assise sur un fauteuil bas, les cheveux largement épandus sur ses blanches épaules, penchait tendrement la tête vers le ménestrel blotti à ses pieds.

Olivier de Corbalon ne dit mot, mais un éclair traversa la prunelle de ses yeux. Il se retira précipitamment, un rictus déformant son visage et la porte lourde de la grand-salle se referma lourdement et lugubrement derrière lui.

La peur saisit les amants quand un bruit formidable ébranla le château. Le donjon tressaillit et bascula sur ses bases, la terre s'entrouvrit et engloutit les amoureux dans ses entrailles, avec fracas.

Un bûcheron raconta plus tard qu'il avait aperçu sur la lande un cavalier s'enfuir en trombe, mais on n'entendit plus jamais parler du Sire de Corbalon dans la comté.

Il arrive de nos jours parfois, qu'au cours de leurs travaux, des paysans découvrent des blocs de pierre, vestiges de l'antique donjon. Mais tous sont persuadés que toutes les murailles et les salles du manoir existent encore, englouties sous le Vivier Noir.

Si vous vous reposez au bord de cet étang, à l'ombre des vieux chênes, penchez-vous un peu. Peut-être alors distinguerez-vous dans les eaux noirâtres, la chevelure dorée de Magdeleine de la Vielle-Cour."


dimanche 8 juillet 2012

Saint Goberien


Voici donc un nouveau conte en patois que j'extrais du recueil de l'Abbé Chenet. J'ai décidé de modifier un peu l'orthographe de l'original, pour mieux coller à la prononciation que j'ai dans l'oreille et dans le souvenir du patois de ma grand-mère.


L'histoire est simple : au catéchisme, qui se tient dans une chapelle où sont des statues de Saints, le vicaire demande le nom de l'un d'entre eux, dont la représentation est abîmée et dont le tronc est toujours vide.

Le conte situe dans un premier temps le lieu de l'action. Il s'agit de la Chapelle Saint-Jean qui existait encore Place Simon vers 1880, soit peu de temps avant la naissance de l'abbé Chenet. Je remets ci-joint un extrait cadastral de 1830 déjà publié, où l'on peut situer l'édifice (ainsi d'ailleurs que l'ancienne église), en bas, en gris :



D'abord dédiée à Saint-Julien de Guémené, cette chapelle avait été fondée au moyen-âge par les seigneurs de Montnoël pour leur servir d'enfeu (lieu de sépulture).


Reconstruite en 1709, elle était rectangulaire, son chevet polygonal et sa voûte était peinte. On y faisait jadis des baptêmes, des mariages et des enterrements.


Une ancienne dalle tumulaire (pierre tombale) datée du XVème siècle et provenant de cette chapelle se trouve rue du Grand Moulin : elle est en granit et le gisant est gravé en creux, les mains jointes. Autour de la pierre une épitaphe en lettres gothiques presque illisibles, il s'agit vraisemblablement d'un seigneur de Montnoël du XIVème siècle. 


Cette chapelle, servit de mairie pendant la Révolution.


Le conte se poursuit ensuite par l'exposé de la situation du pauvre Saint délaissé, en justifiant son abandon par une explication emprunte de bon sens populaire : s'il n'a pas de sous dans son tronc, c'est qu'on ne peut pas, pour des intercessions efficaces, se fier à un inconnu !

La chute de l'histoire est gentillette et illustre le proverbe selon lequel la vérité sort de la bouche des enfants.

Voici donc ce morceau sympathique :


Tout à couteu d’la piac’Simon
Où t’eut d’aoutfail’ la veuille église
A la dreut’ de la rue des Ponts
Enteur le jardrin et la r’mise
Se trouveut la Chapell’ Saint-Jean
Où l’on faiseut le catéchisse
Aux gars et aux fill’ de dix ans
Qu’éteuent pas terjous sans malice
Comm’ vous l’vereuz dans cette histouère
Que j’ai oui dir’ à Jean Martin
Qu’en aura fait du Purgatouère
Pour manqu’ de respect à un Saint.
- Y’avait donc dans la p’tite chapelle
Cinq ou six veuill’ statues en bois :
Saint Jean, Saint Paul, si je m’rappelle
Et vantié ben cor deux ou trois.
Les noms t’euent marqués par en d’sous
Et dans un tronc à grouss’ fenures
Chacun veneut apporteu des sous
Pour obtenir des guérissures.
Mais dam’, y aveut un Saint ben vieux
Qui n’aveut pu guère de peinture,
Le nez casseu et ren qu’un z’yeux.
Y faiseut ben triste figure
On n’aveut jamais su son nom,
Personn’ metteut ren dans sa boite
Allez li porteu ? A quoi bon,
Ça n’s’reut point un’ prière adroite :
On seut-y s’ment d’où y t’eut v’nu
Faut terjous s’méfieu, par prudence
Des gens qui vous sont inconnus
Et qui n’ont point de r’connaissance.
- Un jour donc le vicaire du temps
Dit aux gars de son catéchisse :
" Les gars, j’donn’ un bon point su’l champ
Au sien d’vous qu’aura l’pu d’malice
Et répondra à ma question :
Du vieux Saint qu’vous voyeuz là-bas
Voyons les gars qui m’dira le nom.
- Moi, dit Milet. - Hé ben mon gars
Chom’te ben vit’ et n’ai pas pou.
- J’se chomeu. - Allons et ben… ?
Et ben, puisqu’y n’a jamais d’sous
Je creu que c’est Saint Gobe-Rien…"

Cinéma -Attraction



Avez-vous entendu parler du Cinéma – Attraction ? de ses films à succès ? de son directeur, H. Thomas ?

Le hasard du piochage sur internet m’a permis d’acheter récemment une affichette que je reproduit ci-après.


Dans la vraie vie, elle a à peu près le format d’une demi feuille et devait sans doute être collée aux devantures des commerces de Guémené, avant guerre.

J’aime bien ce genre d’objet improbable car j’imagine avec une certaine volupté mémorielle la scène de cette séance de cinéma : j’entrevois des personnages du bourg voire de la campagne, hommes, femmes, enfants ; un bruit de projecteur qui ronronne, de la poussière dans le pinceau lumineux ; des odeurs, des types ; et la perplexité mêlée d’attente que pouvait susciter le programme annoncé.

Nous sommes donc dans la Salle des Fêtes (où était-elle, au fait, dans les années 30 ?), un 23 novembre, probablement le dimanche 23 novembre 1930. Il fait bon dedans et froid dehors.

Je nous propose de regarder le spectacle - en quelque sorte -, en essayant d’imaginer ce à quoi nos lointains parents et concitoyens de Guémené ont bien pu être exposés. Il est 15 heures, la séance débute.


Le programme

Il comporte un reportage, le film principal et sans doute un numéro de comédie.

En apéritif, le sujet d’actualité est édifiant et exotique : le Congrès eucharistique de Carthage, en Tunisie.

Vient ensuite en plat de résistance (si j’ose dire) un « grand » film patriotique qui vante le mérite de deux espionnes françaises pendant la première Guerre Mondiale.

En dessert, « un grand comique à fou-rire » dont on ne peut rien deviner, maintenant.

Il est très probable que de la musique ait accompagné ce programme, comme le vin accompagne le repas.

On précise au bas de l’affichette que « le spectacle est de grande ampleur » (qu’est-ce à dire : largeur de l’écran, variété du programme, longueur de la séance ?) et que la « source lumineuse électrique est puissante » (on comprend que quelques fois on ne voit pas grand-chose lors des projections cinématographiques…).

Voyons cela de plus près…


Le congrès eucharistique de Carthage

Un congrès eucharistique est un rassemblement de clercs et de laïcs en vue de l'évangélisation par l'adoration de la Sainte Eucharistie. Bref, que du fun...

Il existe des congrès eucharistiques régionaux, nationaux et internationaux. Celui de Carthage, le premier en Afrique, eut lieu du 7 au 11 mai 1930.

Il a été perçu localement comme une provocation, car de jeunes catholiques costumés en Croisés rappelaient aux musulmans colonisés la victoire des « Francs » sur l'Afrique du Nord...




Léger, quoi...D'ailleurs, la génération tunisienne montante, tel l’avocat et futur président de la Tunisie Habib Bourguiba, fustigera cet événement dans des articles de journaux.

Pas sûr que ce sujet colonialiste et calotin ait suffi à chauffer la salle.. Que pouvait bien en penser l’assistance guémenéenne ? Mystère….




Espionnage ou la guerre sans armes (1928)

Il s’agit d’un film français sorti en France le (vendredi) 26 avril 1929 (96 minutes, noir et blanc, muet) et donc antérieur de deux ans à l’œuvre qui apportera une certaine notoriété à son réalisateur (voir ci-dessous).

Personne donc ne pouvait avoir entendu parler de « Jean Choux », l’auteur de ce chef-d’œuvre. Qui pouvait donc bien être attiré par cette affiche à Guémené en 1930 ? Evidemment, s’appeler « Choux » ne pouvait pas rebuter dans un univers tout acquis à l’agriculture.

Le film évoque de façon romancée le parcours d'une espionne et résistante française au service des forces britanniques durant la guerre de 14 - 18. Il s'agit de Louise de Bettignies qui créa dans la région de Lille un réseau de renseignement et qui mourut en captivité en 1918.




Jean Choux, sa vie, son oeuvre

Jean Choux est un réalisateur, dialoguiste, interprète, superviseur de la réalisation, scénariste, adaptateur, monteur, producteur, peintre et poète (ouf !) français (ou suisse !) né le 6 mars 1887 à Genève et mort le 6 mars 1887 à Paris.

Juriste de formation, journaliste à ses débuts en Suisse, il publie un recueil de poésies. Il se passionne pour la critique cinématographique et se met rapidement à l'écriture de scénarios. Il réalise en Suisse son premier film en 1925, La Vocation d'André Carrel ou La Puissance du travail avec Michel Simon. À Paris, il tourne cinq autres films muets, tous interprétés par son épouse, l'actrice Thérèse Reignier, dont Espionnage ou la guerre sans armes (1928).


Jean Choux acquiert la notoriété grâce à son unique succès Jean de la lune (1931), adapté de la pièce de Marcel Achard, avec Madeleine Renaud, Michel Simon... Il dirigera notamment Arletty (Un Chien qui rapporte, 1931- sa première apparition sur les écrans) ; Françoise Rosay (Maternité, 1934) ; Alice Cocéa et Harry Baur (Le Greluchon délicat, 1934) ; Pauline Carton et Dita Parlo (Paix sur le Rhin, 1938).

En 1939, à la déclaration de guerre, il est à Rome pour le tournage d'Angélica avec Vivian Romance. Avant son retour en France, il réalise un film italo-espagnol, La Naissance de Salomé.

En 1942, il tourne La Femme perdue avec Renée Saint-Cyr. Enfin, sa dernière réalisation, L'Ange qu'on m'a donné, sort fin mars 1946, alors qu’il vient de mourir.

Au total, sa filmographie qui paraît bien servie par les acteurs de l’époque, compte une trentaine de long métrages. Mais la valeur de son œuvre a été pour le moins contestée : on lui reproche rien moins qu’un style « grossier et empâté ». D'autres, parait-il, lui ont trouvé quand même « un sens poétique inné ». Aujourd’hui on n’en pense plus rien.


Références intéressantes sur le Web

http://www.cineressources.net/recherche_t.php (site sur les ressources des archives cinématographiques)

http://anabases.revues.org/343 (site d’une revue d’histoire ; article sur le congrès de Carthage)

http://fr.wikipedia.org/wiki/Louise_de_Bettignies (excellent article dans Wikipedia sur Louise de Bettignies)

Article sur Jean Choux dans Wikipedia